Maisons de cinéma : Fenêtre sur cour... à la maison Ciné-club mensuel présenté par Charlotte Garson

Les circonstances qui ont contraint les Cinoches à fermer provisoirement tronquent le ciné-club « Maisons de cinéma » de trois de ses séances – l’occasion de les organiser soi-même… à la maison !

Fenêtre sur cour ou l’immeuble-télévision

Fenêtre sur cour (Rear Window)  un film d’Alfred Hitchcock (USA, VO, 1955, avec James Stewart, Grace Kelly, durée : 1h50) 

À cause d’une jambe cassée, le reporter-photographe L. B. Jeffries est contraint de rester chez lui dans un fauteuil roulant. Homme d’action et amateur d’aventure, il s’aperçoit qu’il peut tirer parti de son immobilité forcée en étudiant le comportement des habitants de l’immeuble qu’il occupe dans Greenwich Village...

Vingt ans après Le Crime de monsieur Lange de Jean Renoir, Alfred Hitchcock décide lui aussi de faire d’une cour d’immeuble un décor principale, c’est-à-dire une scène : immobilisé chez lui (cela vous rappelle-t-il quelque chose ?), le photographe L.B. Jeffries n’a d’autre occupation que de jeter des coups d’œil incessants sur ce petit théâtre du voisinage : la vie aperçue par fragments, à travers les fenêtres, sur les escaliers de fer qui à New York servent de sorties de secours en cas d’incendie, ou en contrebas, dans un semblant de jardinet. Contrairement à Renoir qui fait de la cour un espace commun qui va devenir le lieu d’un crime unificateur, le vis-à-vis hitchcockien est une collection de vignettes, séparées les unes des autres, comme autant de chaînes de télévision devant lesquels le regard du convalescent zapperait distraitement. Dans cette perspective, on peut aller jusqu’à penser que pour rompre la monotonie de son érotisme paresseux qui consiste à espionner la danseuse s’entraînant au balcon ou le couple de jeunes mariés, l’observateur ennuyé projette un événement bien plus dramatique – la disparition de la femme du couple mûr d’en face, qui se disputait souvent.

Mais l’intérêt du film consiste à faire interagir l’extérieur et l’intérieur. Comme la masseuse de Jeffries, Hitchcock nous prévient, nous qui sommes « planqués » dans le noir : cette posture de pur spectateur, protégée, n’existe pas. Pour le dire en termes de montage : le champ et le contrechamp ne sont pas étanches l’un à l’autre, parfois « ça » communique, exactement comme les appartements new-yorkais, aux murs de briques peu isolants laissant passer la chaleur et les bruits. L’extérieur violent peut toujours contaminer l’intérieur, et d’ailleurs, ce mariage sanglant qu’il observe en face, Jeffries n’y pense-t-il pas parce que sa charmante fiancée, mannequin de son état, le presse trop à son goût de lui passer la bague au doigt ?

Charlotte Garson

A visionner en VOD sur FilmoTV :

https://www.filmotv.fr/film/fenetre-sur-cour/14487.html

Ou à commander en DVD ou Blu-Ray :

http://films.potemkine.fr/Potemkine-fiche-film/Fenetre-sur-cour/pa11m5pr1017.html

A lire : L’article de Romain Genissel sur Critikat :

https://www.critikat.com/actualite-cine/critique/fenetre-sur-cour/

A voir : Deux analyses de séquence (choisir l’onglet « Vidéos ») :

http://www.transmettrelecinema.com/film/fenetre-sur-cour/#video